
– Un recueil de 6 poèmes augmentés intitulé : [La falaise.]°
« De la Poésie à couper le souffle »
Ce titre pourrait, avec une dose de clins d’œil complices, être attribué à l'artiste dont l’œuvre filmée et composée en volume et son est présentée en juin à Berlin. Titre un peu professoral... admettons-le, mais Georges Paumier est un artiste qui s'intéresse au savoir, à la connaissance et ne part pas au hasard dans l'écriture d'un dessin, d'un film, d'une installation. Son regard précis et curieux en témoigne. Il se dit lui-même « plasticien-poéticien ». Nul doute que « Poésure et Peintrie » appartiennent à son panthéon.
Pour cette exposition, Georges Paumier propose donc une série de films courts dont on peut dire qu'ils tissent des relations étroites avec d'un côté les œuvres de Kurt Schwitters et de l'autre le lettrisme d'Isidore Isou. Pourquoi ? C'est une filiation tout à fait évidente et que l'artiste franco-américain admet avec un sourire en coin tout à fait charmant. Son univers artistique, fait de collages, superpositions, narrations syncopées, mise en volume humoristiques et étranges... tout ceci contribue à offrir au spectateur une sorte de ballet graphique intime et absurde, joyeusement désinvolte.
Ses installations sont véritablement chorégraphiées et orchestrées.
Six films courts, Falaise, sont projetés en grand format. Ce sont des « image bougées ». Parfois précises, parfois imprécises, des images se succèdent et se superposent formant des « tours de passe-passe ». Les cadres bougent aussi, ils se s'emboitent les uns dans les autres, se contredisent et s’effacent ou se dispersent. S'impose une certaine gravité : ces « images bougées » sont conçues dans l'horizon de la « nuit remue » d'Henri Michaux. C'est le vacillement de la réalité que cherche Georges Paumier. Ce vacillement, cette ondulation, ce / cette vague, sont ceux du vertige au bord du précipice ; au bord de la falaise vers lequel court un groupe de personnes...
Devant ces montages / collages graphiques, ces compositions sonores et ces objets placés devant l'écran (des « remuants »), tout se cache et se montre, tout se dit de manière morcelée, murmurée, suggérée... dans une sorte de chaos ordonné et d'esprit sans logique. Un ballon gonflé d'air inspiré /expiré depuis les hauteurs des « falaises » prend la pose près de l'écran. « Pneumatique » chez Isou, c'est le souffle de l'âme, la respiration d'un langage sans ordre ni message.
Fidèle au monde des rêves révélé par Dada, les Surréalistes et les Lettristes, [ La falaise ]° propose l'expérience de « traces d'images », d' « hypnoses » et de narrations sans cesse interrompues. Un flux de douceur et d'intelligence, de sensibilité grave et d'astuces joyeuses.
Jérôme Diacre